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Hôpital – Des contes pour les personnes en fin de vie

2010 © l’Alsace – 19 Février 2010 – Tous droits de reproduction réservés

Nicole Docin-Julien, conteuse depuis 15 ans, intervient en soins palliatifs pour « donner du sens à la mort ».

AccompagnementConter la vie à ceux qui vont mourir

Pour Nicole Docin-Julien, le conte est un support, un outil au contact de l’échange et propice à la discussion.

L’association C’est tout un art propose des activités de contes dans un service de soins palliatifs à Strasbourg. Elle vient de recevoir un soutien financier de 3 000 € de la Fondation Passions Alsace (*), sous l’égide de la Fondation de France.

 « Il était une fois… » : de sa voix chantante, la conteuse Nicole Docin-Julien déroule une histoire qui parle de rêve et de trésor. Christophe et Philippe écoutent attentivement, le visage béat, effleuré d’un sourire aux rebondissements du conte. Nous sommes dans un petit salon du service de soins palliatifs de la clinique de la Toussaint à Strasbourg. Là où la conteuse intervient régulièrement. « C’est un cadeau, confie Philippe. J’aime toutes les histoires qu’elle nous raconte. J’ai redécouvert les contes avec elle. Bien sûr, on m’en racontait quand j’étais petit, mais je ne pensais pas qu’à mon âge, on pouvait encore m’en dire ! »

Derrière lui, Christophe hoche la tête pour marquer son approbation. Aveugle depuis quelques mois, il vient de perdre l’usage de la parole. Mais son visage s’illumine quand Nicole explique : « C’est un privilège précieux de pouvoir intervenir auprès des patients en soins palliatifs et d’apporter de la douceur et du réconfort à ceux qui en ont besoin. »

Donner du sens à la mort

Cela fait près de 15 ans que Nicole Docin-Julien est conteuse et elle affirme qu’elle a « toujours su » qu’un jour elle interviendrait en service de fin de vie. « Le conte est divertissant, mais peut aussi permettre d’accompagner les personnes dans la mort. » En soins palliatifs, elle privilégie des contes courts, « participant à la confiance en la vie, l’amour de la vie, mais qui parlent aussi de son mystère, incluant la mort. » Pour elle, il s’agit de  donner du sens à la mort, qui elle-même donne du sens à la vie. C’est un point final provisoire…

Dans le service, la conteuse a vu comment les personnes appréhendaient leur mort prochaine : « Certaines sont fatiguées et aspirent à mourir. D’autres voudraient continuer de vivre, mais confrontées à l’inévitable, acceptent de partir, accompagnées par la bienveillance et la profonde humanité de l’équipe soignante. »

Irruption de l’imaginaire

Nicole ne s’impose jamais aux patients mais les laisse libres de l’accueillir ou non. Elle va aussi vers les familles et les visiteurs des malades pour leur proposer un instant de respiration. « Je conte pour ces personnes », explique-t-elle doucement et on entend « Je compte » pour elles.

Ainsi, elle a conté pour une famille qui rendait visite à une jeune maman. Épuisée, celle-ci voulait accueillir ses enfants mais n’en trouvait pas la force. « Nicole Docin-Julien a offert un sas entre la visite à la malade et la sortie explique Cécile Daout, infirmière cadre de santé. Cela a beaucoup apaisé la mère de savoir qu’un geste était fait pour sa famille qu’elle n’avait pas pu accueillir comme elle le souhaitait. » Les interventions de Nicole s’adressent aussi au personnel soignant. Comme le relève le Dr Véronique Vignon, responsable du service. « Le bonjour de la conteuse, c’est déjà tout un conte ! Nicole, avec sa gaieté et son enthousiasme, c’est comme une fenêtre qui s’ouvre sur le monde extérieur, avec sa légèreté face à la lourdeur de la maladie. » Une infirmière du service renchérit : « Les contes, c’est l’irruption de l’imaginaire, de la poésie qui sont très importants et qui nous font du bien. On est mis à égalité devant une histoire, à l’écoute de quelque chose d’assez universel. »

Repères

Nicole Docin-Julien habite Strasbourg dans le quartier Gare. Pour dynamiser ce quartier qu’elle aime « pour sa diversité ethnique et culturelle », elle a lancé le festival « Couleurs Conte ». La 4 e édition aura lieu en juillet 2010.

Son association C’est tout un art propose des contes au domicile des seniors et des contes en soins palliatifs. Elle intervient aussi à la demande de la clinique pour des cérémonies trimestrielles, en hommage aux personnes décédées dans le service.

Elle-même écrit des contes, puisés dans les légendes du quartier, des histoires qui commencent à être publiées.

Geneviève Daune-Anglard

(*) La Fondation Passions Alsace a pour objet d’aider les projets d’intérêt général portés par des associations alsaciennes quel que soit leur objet, et notamment les petites associations qui font un travail de lien social sur le terrain. Renseignements sur Internet : www.fondationpassionalsace.com